Chapitre 4

Publié le par Löwely

La salle était grise, mais propre. Elle semblait assortie à la professeur, qui n’avait pas vraiment l’air dangereux. Non, elle avait juste l’air ratatinée et faisait peur. Bill s’approcha de la seule place restée vide : celle à côté de Sam, son rouquin de colocataire.

Sam poussa ses affaires avec quelques doutes. Il redoutait les foudres du jeune gothique, mais ce qu’il ignorait, c’est que son voisin avait encore plus peur que lui. Kirke souriait sournoisement, le visage tourné vers les deux habitants de la chambre 102.

Le cours commença, en silence. La vieille pie qui leur tenait lieu de professeur avait commencé le cours par la biographie de Kafka, version longue. Pourtant, les élèves semblaient concentrés sur leurs notes et même Kirke s’appliquait à suivre la leçon en alignant des lettres sur son cahier gris.

La leçon était particulièrement ennuyeuse et Bill se mit à dessiner dans la marge. Les petits bonhommes s’alignaient depuis au moins dix bonnes minutes lorsque Sam se décida à glisser une feuille sur son cahier. L’écriture fine et appliquée de Sam se déroulait le long du quadrillage, formant des boucles parfaites.

« Désolé pour l’autre soir, j’ai pas eu le choix… Désolé !

- M’en fous

- Stp, J’suis vraiment désolé ! Kirke m’oblige à lui obéir !

- Et si tu refuses ?

- La chambre 102, c’est celle des esclaves à Kirke ! On doit lui obéir pour pouvoir quitter la chambre !

- C’est n’importe quoi. Tu plaisantes ?!

- Non ! Et personne n’ose te parler ! Désolé encore »

Bill observa la différence entre son écriture pourrie et celle de son voisin, puis repoussa la feuille, histoire de couper court à la conversation, et se remit à dessiner des figures, plus hargneuses, plus vilaines. Sam était gêné, son gêne redoubla lorsque la professeure l’interrogea. L’allemand ne put s’empêcher de sourire, il avait eu sa petite revanche personnelle. C’était déjà ça.

Il finit par se détendre et se remit à penser à Tom, resté seul, à ses blessures qui le faisaient souffrir, et à Thomas qu’il confondait régulièrement avec son jumeau. Il ne savait pas trop comment réagir face au majordome ; ses récentes mésaventures le hantaient encore, et il avait l’esprit trop occupé pour se consacrer à une nouvelle amitié.

 

La sonnerie résonna et un professeur inintéressant remplaça la blonde au tableau. Bill ne se souvint même pas des cours qui suivirent. Quant à Sam, il n’essaya même plus de lui faire passer des mots, effrayé des réactions imprévisibles du jeune gothique.


L’heure du dîner fut finalement là et Bill, taraudé par la faim, suivit précipitamment les autres jusqu’au réfectoire. Hélas, il n’était pas au bout de ses peines. Kirke s’approchait de lui, encadré par deux sales types baraques.

- Salut, fillette ! La séance d’hier n’était qu’un premier essai ! Si tu ne m’obéis pas, tu en subiras encore beaucoup d’autres ! Alors, j’ai ton accord ?

L’androgyne se sentait gêné, il ne savait pas comment réagir. Il aperçut à cet instant Thomas, qui portait deux énormes valises. Ce dernier remarqua son petit protégé avec Kirke et comprit immédiatement la situation. Il hocha alors vivement la tête. « Accepte ! Accepte ! » articulait-il en silence. Bill obtempéra et souffla :

-D’accord, Kirke ! Je te suis !

La brute se fendit d’un sourire méchant et fourra un papier rouge dans la paume tremblante de sa nouvelle recrue.

- Première mission ! Ne me déçoit pas, hein !?

Il lança Bill en plan et disparut aussitôt, traînant dans son sillage quelques élèves brutaux.

Lorsque l’allemand se retrouva face à son plateau repas, qui semblait délicieux d’ailleurs, sa faim avait disparu et il se dirigea vers sa chambre maudite avec un flan à la main, son estomac noué.

Sam était resté au réfectoire, assis dans son coin, à grignoter sa carotte avec application. Aussi se retrouva-t-il seul dans la pièce blanche… Il alluma son portable et consulta sa boîte SMS : il avait un nouveau message, de Tom. Son cœur manqua un battement.

LE ROMAN
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